A la fin du XVIIe siècle et au début du XVIIIe, trois couples de mes ancêtres vivaient à Villard-Saint-Christophe, un petit village de l'Isère, proche de La Mure sur le plateau Matheysin :
- Bertrand Froment [736] (1662-1734), marchand au hameau de La Traverse, qui était venu s'installer dans ce village après son mariage avec Marie Baret [737] (?-1726).
- Jean Gondrand [738] (1675-1745), marchand à Villard Saint-Christophe, et Dimanche Guignier [739], du village voisin de Saint-Honoré. Après le décès de sa première épouse, Jean Gondrand, a épousé Magdeleine Second, de Villard-Saint-Christophe (1690-1772), fille du couple suivant. Leur descendance se confond donc avec la leur.
- Jacques Second [740] (1656-1738), notaire royal à Villard-Saint-Christophe, et Marie Badon (1667-1731). J'ai eu l'occasion de parler plus longuement de cette famille dans le message que j'ai consacré au livre de raison de leur fils Jacques Second.
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Vue aérienne de Villard-Saint-Christophe (source : site de la commune) |
J'ai fait la descendance complète de ces trois couples à Villard-Saint-Christophe, tant pour les branches masculines que féminines. Ce sont mes ancêtres à la 10e génération. Et, pour leur arrière-petit-fils Joseph Froment [92] (1764-184), mon ancêtre à la 7e génération, j'ai fait la descendance la plus complète possible de toutes les branches dans tous les lieux. En définitive, aujourd'hui, pour chacun de ces couples, je connais respectivement 2 510, 2 334 et 2 262 descendants directs (hors conjoints), soit pour les trois couples confondus, 2 730 personnes. Si on y ajoute les conjoints, le total passe à 3 836 personnes.
Je me suis interrogé sur le nombre de descendants de ces trois couples qui vivaient encore à Villard-Saint-Christophe en 1936. Pour cela, j'ai relevé les 256 personnes recensées à cette date et les ai rattachées à chacun de ces trois couples. Autrement dit, quelle était l'empreinte de ces trois couples sur la population du même village (son périmètre n'a pas changé dans le temps) entre la fin du XVIIe siècle et presque deux siècles et demi plus tard, en 1936. En définitive, ce sont 155 personnes sur 256 qui descendaient d'un ou de plusieurs de ces couples, soit 61 % Si l'on exclut de la population de 1936 les personne qui vivaient temporairement dans le village comme le curé et sa servante, l'institutrice et les 17 domestiques, dont beaucoup venaient de l'Assistance publique, la base de calcul, qui est celle que nous utiliserons par la suite, est de 236 personnes. On peut donc dire que 66 % des habitants de Villard-Saint-Christophe en 1936, soit les deux tiers, descendaient de Bertrand Froment, et/ou Jean Gondrand et/ou Jacques Second.
Le détail par ancêtre est le suivant :
- Froment : 146 (62 %)
- Gondrand : 148 (63 %)
- Second : 109 (46 %)
Et 94 personnes (40 %) descendaient des trois couples.
Pourtant, les nombres de porteurs de chacun des trois noms sont bien plus faibles, signe que la permanence de ces trois couples s'est surtout faite avec les branches féminines :
- Froment : 14.
- Gondrand : 12.
- Second : 4.
Si l'on prend maintenant la question dans l'autre sens, ce sont 101 personnes qui n'ont aucun lien avec ces trois couples. Parmi celles-ci, les différents cas sont :
- Conjoints nés en-dehors du village, comme Marie Escalle, née à Monestier-de-Clermont, épouse d'Albert Guignier ou Cyprien Serme, de Saint-Pierre-d'Entremont, installé au village après son mariage avec Blanche Fuzat.
- Familles installées au village en provenance d'autres lieux, soit de France, mais aussi d'Italie. C'est le cas de Clément Machot, cabaretier au village, venu de La Motte-d'Aveillans, du boulanger Eugène Gaillard, de Seyssel, en Savoie, d'Urbain Gonsolin et sa nombreuse famille, venu comme métayer depuis Saint-Jacques-en-Valgodemard ou, dans le même ordre d'idée, la famille italienne de Louis Perret, cultivateur aux Gondrands.
- Familles anciennes de Villard-Saint-Christophe qui n'ont jamais eu d'alliances avec les descendants d'un ou de plusieurs de ces couples.
Sur ce dernier cas de figure, ce sont entre 8 et 9 générations qui se sont succédées au village, donnant autant d'occasions, à chaque génération, d'établir des alliances. Par exemple, les porteurs du nom de Lafond au village (Victorin et Pierre) en 1936, dont la famille est attestée à Villard-Saint-Christophe depuis la fin du XVIIe siècle, n'ont aucun lien avec les Froment, les Gondrand ou les Second. Il semble, mais cela reste à confirmer, que la position sociale des trois couples d'ancêtres les ait conduits, au fil du temps, à maîtriser les alliances au sein d'une niveau social à peu près équivalent, ce qui excluait certaines familles peut-être considérées comme n'étant pas éligibles à des liens matrimoniaux avec un des descendants de ces trois couples. Ces positions expliquent probablement la forte endogamie entre les différentes branches. Pour donner un exemple, Jeanne Froment (1766-1850), arrière-petite-fille de Bertrand Froment, a épousé Jacques Poncet (1757-1841), arrière-petit-fils de Jacques Second. Mais, Jacques Poncet était aussi un arrière-petit-fils de Bertrand Froment par sa mère et Jeanne Froment une arrière-petite-fille de Jacques Second par sa mère. Et leurs petites-filles, Justine Michon (1832-1891) ou Adeline Michon (1838-ap.1906) ont toutes les deux épousé des descendants de Bertrand Froment. On pourrait multiplier les exemples. Celui-ci illustre graphiquement les multiples liens de parenté entre Albert Guignier et Marie Thérèse Froment qui se sont mariés à Villard-Saint-Christophe le 9 avril 1942 :
Sachant qu'Albert Guignier et Marie Thérèse Froment descendaient aussi tous deux d'Antoine Chaffoin à la 6e génération.
Pour finir, si on inclut les conjoints dans le calcul, autrement dit si on considère que ces conjoints ont un lien par leur mariage avec un ou plusieurs de ces trois couples, on arrive à un total de 180 personnes, soit 76 % de la population du village en 1936. L'empreinte laissée par Bertrand Froment, Jean Gondrand et Jacques Second est donc majeure dans la composition de la population et remarquable par sa permanence dans le temps.
Liens vers les généalogies de :
- Bertrand Froment [736] (1662-1734) et Marie Baret [737] (?-1726)
- Jean Gondrand [738] (1675-1745) et ses deux épouses Dimanche Guignier [739] et Magdeleine Second (1690-1772)
- Jacques Second [740] (1656-1738) et Marie Badon (1667-1731)
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Villard-Saint-Christophe (source : site de la commune) |